17. Sermons choisis

17. Sermons choisis

Chap: 9 - La vigne stérile - Tant de fois la miséricorde infinie de Dieu s’était déployée en la faveur de son peuple ; tant de fois sa main puissante l’avait retirée des dangers les plus imminents, que cette nation orgueilleuse en était venue à s’imaginer qu'elle ne serait jamais rejetée.

« La parole de l’Éternel me fut adressée et il me dit : Fils de l’homme, que vaut le bois de la vigne plus que les autres bois, et les sarments plus que les branches des arbres des forêts ? » (Ézéchiel 15 v. 1 et 2). Rien n’égalait la présomption et l’arrogance de la nation juive. Lorsqu’elle péchait contre son Dieu, elle se flattait qu’en considération soit de la haute sainteté de ses ancêtres, soit d’une certaine sainteté qu’elle s’attribuait à elle-même, le pardon lui était acquis à l’avance, quelque grave, d’ailleurs, que fût son péché.

C’est pourquoi le Seigneur, afin d’humilier sa fierté, lui fait entendre, par l’organe du prophète Ézéchiel, qu’elle ne peut se vanter d’aucune supériorité sur toute autre nation de la terre, et il lui demande ironiquement ce qu’il y a en elle qui puisse la recommander à la bienveillance divine. « Il est vrai, ô maison d’Israël, semble dire le Très-Haut, il est vrai que je t’ai souvent appelée ma vigne ; je t’ai plantée sur un coteau, dans un lieu   gras ; je t’ai cultivée, je t’ai entourée de mes soins ; mais tu ne me rapportes aucun fruit : pourquoi donc continuerais-je à t’avoir pour agréable ? Si tu crois que par toi-même tu vaux mieux que tout autre peuple, tu t’abuses étrangement. Que vaut le bois de la vigne plus que les autres bais, et les sarments plus que les branches des arbres des forêts ? »

Et ici, remarquons, mes frères, que ces paroles ne portent nullement atteinte à la grande vérité de la souveraine et immuable élection de Dieu ; car le peuple d’Israël, vous le savez, n’était pas choisi en vue du salut éternel, mais il était choisi dans ce sens qu’il jouissait de privilèges particuliers : son élection, en tant que peuple, n’était qu’une ombre et une image de cette élection personnelle et inviolable que Christ a exercée envers les siens. De sa véritable Église élue, Dieu ne retirera jamais son amour ; mais quant à l’Église visible et extérieure, il lui cache souvent sa face. À son peuple particulier et qui lui appartient en propre, il donnera toujours des gages de son affection ; mais quant aux chrétiens de nom, à ceux qui font simplement profession d’être ses disciples, il peut le retirer… que dis-je ?

Il leur retirera infailliblement toute marque de sa faveur, Mais pour en revenir à Israël, le Seigneur, je le répète l’humilie par la parabole contenue dans ce texte, en lui rappelant qu’il n’est en rien supérieur à aucun autre peuple. Bien plus : il déclare qu’en soi il est une nation chétive méprisable, indigne d’être mise de pair avec cèdre de Babylone ou avec le chêne de Samar et que s’il ne porte point de fruit, il n’est bon rien, il est absolument sans valeur.

Mes bien-aimés, cette parabole adressée primitivement à Israël, nous allons essayer, avec le secours de Dieu, de nous l’appliquer à nous-mêmes. Deux grands enseignements me semblent en ressortir d’une manière évidente. Le premier s’adresse aux vrais enfants de Dieu, et peut se résumer en deux mots : soyez humbles. Le second s’adresse à tous ceux qui font profession de piété, et peut se formuler ainsi : examinez-vous vous-mêmes.

Soyez humbles : tel est, avons-nous dit, le grand enseignement que donne notre texte à ceux qui ont déjà goûté combien le Seigneur est bon. Que vaut le bois de la vigne plus que les autres bois, et les sarments plus que les branches des arbres des forêts ?

En observant les diverses allusions faites à la vigne dans l’Écriture, il semble qu’une sorte de prééminence lui soit attribuée sur tout le monde végétal ; témoin, par exemple, l’antique parabole de Jotham, où les arbres sont représentés comme s’inclinant devant la vigne, en lui disant : Viens et règne sur nous (Juges 9 v. 8 à 15). Toutefois, si nous considérons la vigne, indépendamment de sa fertilité, il est certain que nous ne verrons rien en elle qui lui donne droit à aucune distinction, encore moins à une royauté quelconque sur les autres arbres. 

Sous les divers rapports de la grosseur, de la forme, de la beauté, de l’utilité, le cep de vigne, en effet, leur est infiniment inférieur.

Il n’est propre à aucun usage, En prendra-t-on du bois pour en faire quelque ouvrage, ou en prendra-t-on une cheville pour pendre quelque chose (Ézéchiel 15 v. 3) ? À part sa fertilité, la vigne est donc à peu près inutile. Nous l’admirons, il est vrai, lorsque nous la voyons tapisser de son riche feuillage les murs de nos demeures ; et, en Orient surtout, où les plus grands soins étaient apportés à sa culture, elle atteignait le plus haut degré de luxuriance. Mais qu’on prenne la vigne à son état de nature, qu’on la laisse à elle-même, elle est, sans contredit, un des arbrisseaux les moins intéressants les plus inutiles qui croissent sous le soleil.

Or, mes bien-aimés, il en est de même l’Église de Dieu, et voilà pourquoi l’humilité est pour elle un impérieux devoir. Les croyants sont appelés la vigne du Seigneur ; mais par nature, que valent-ils plus que leurs frères Adam ? Ils ne sont pas meilleurs que leurs semblables ; il est même des hommes du monde qui leur sont infiniment supérieurs, soit par l’émanation de leurs sentiments, soit par l’excellence de leurs qualités. Sans doute, par la grâce Dieu, les chrétiens sont devenus des sarments fertiles ; ils ont été plantés dans un bon terroir et le Seigneur a étendu leurs rameaux sur les murailles du sanctuaire, et maintenant ils ont obtenu du fruit à sa gloire. Mais ; j’en appelle à leur propre témoignage, que seraient-ils sans la miséricorde de leur Dieu ? Que deviendraient ils sans l’influence continue du Saint-Esprit qui seule féconde leurs âmes ? 

Ne sont-ils pas les derniers parmi les fils des hommes, les plus méprisables entre ceux qui sont nés de femme ? Considère ceci ; ô croyant ! Avant conversion, qu’y avait-il en toi qui pût te rend agréable aux yeux de Dieu ? Que dis-je ? Maintenant même, qu’y a-t-il en toi dont tu aies pu te glorifier ? Ta conscience ne t’accuse-t-elle point sans cesse ? Est-il un seul jour de ta vie dans lequel tu n’offenses point le Seigneur, et tes infidélités, tes égarements sans nombre ne te disent-ils pas que tu es indigne d’être appelé son fils ? 

La faiblesse de ton intelligence, la fragilité de ton sens moral, ton incrédulité toujours renaissante, tes chutes réitérées, en un mot, tes misères de tous genres ne t’obligent elles pas à reconnaître que tu es moins que le moindre de tous les saints ? Et s’il a plu à Dieu de faire de toi quelque chose, ne dois-tu pas avouer que c’est uniquement par un effet de sa grâce, de sa grâce libre et souveraine, que tu es ce que tu es ?       

Ah ! S’il y avait dans ce moment devant moi une âme qui, tout en se considérant comme élue de Dieu, ne fût pas prête à s’associer à ces aveux, mais se persuadât qu’elle a été choisie en considération de quelque mérite ou de quelque bon sentiment qui lui était propre ; que cette âme sache bien qu’elle n’a encore rien compris aux premiers éléments de la grâce, et qu’elle est dans les ténèbres par rapport à l’Évangile. 

Tout homme qui a reçu la vérité d’une manière efficace doit être prêt à confesser en toutes rencontres qu’il est le plus vil des pécheurs, le rebut de toute la terre ; que par nature il était perdu, souillé, indigne, ou plutôt digne de la condamnation, digne de l’enfer ; et que s’il a été choisi dans le monde et rendu différent de ses semblables, c’est uniquement à la grâce toute gratuite, à l’amour spontané et immérité de son Dieu qu’il en est redevable. Ô chrétien, toi qui es aujourd’hui grand par ta foi et grand par tes œuvres, tu ne serais grand que par tes péchés, si ce n’était la grâce de Dieu.

Ô toi, vaillant soldat de la vérité, tu serais non moins vaillant à combattre pour Satan, si une influence divine n’avait agi sur ton cœur ! Un trône de gloire t’est réservé dans le ciel ; mais tu n’aurais eu à attendre qu’une chaîne d’obscurité en enfer, si l’Esprit saint ne t’eût transformé. Maintenant tu exaltes l’amour de ton Sauveur ; mais une chanson licencieuse serait peut-être sur tes lèvres, si la grâce ne t’avait lavé dans le sang de Jésus. Maintenant, tu es sanctifié, vivifié, justifié ; mais, je te le demande, que serais-tu en cet instant même, si la main du Très-Haut n’était intervenue en ta faveur ?

Il n’est point de crime dont tu n’eusses pu te rendre coupable ; il n’est point d’excès, point de vice dans lequel tu n’eusses pu tomber : peut-être, à cette heure, serais-tu un meurtrier, si la grâce préventive de Dieu n’eût retenu ta main. Un jour, tu seras rendu semblable aux anges ; mais tu aurais été semblable aux démons, si la grâce n’eût fait de toi une nouvelle créature. C’est pourquoi, ô chrétien, ne t’élève jamais par orgueil. Souviens-toi que tous tes vêtements te viennent d’en haut : des haillons étaient ton seul héritage. Souviens-toi que la somptueuse demeure, l’inépuisable trésor qui t’attendent pour l’éternité sont un don de ton Père céleste : il fut un temps où tu ne pouvais dire que rien fût à toi, si ce n’est tes péchés et ta misère.

Maintenant la précieuse justice de ton Sauveur te couvre, et revêtue de la robe Sans tache du Bien-Aimé, ton âme est acceptée de Dieu ; mais n’oublie pas que tu Serais encore comme enseveli Sous des montagnes de péché, et enveloppé dans les haillons souillés de l’iniquité, si Dieu n’avait eu pitié de ton lamentable état. Et toi, ô mon frère, tu pourrais t’enorgueillir ? Tu pourrais ne pas marcher avec les humbles ? Ah ! Etrange mystère, inexplicable contradiction ! 

Quoi ? Tout ce que tu as est emprunté, et tu oserais te glorifier ! Tu ne possèdes rien qui t’appartienne en propre, tu ne vis que d’aumônes, et tu serais orgueilleux !

Misérable indigent, dénué de toute ressource, tu dépends entièrement de la munificence de ton Sauveur, et tu serais vain ! Pauvre âme fragile et languissante, tu as une vie qui ne peut être alimentée que par les ruisseaux vivifiants dont Jésus est la Source, et tu serais fière ! 

Va, mon bien-aimé, défais-toi à tout jamais de ton orgueil ; dépouille-t’en au plus tôt ; pends-le à un gibet aussi haut que celui d’Haman ; laisse-l’y tomber en poussière, et exècre sa mémoire jusque dans l’éternité ; car, en vérité je te le dis parmi toutes les choses dignes d’être maudites, haïes et méprisées, l’orgueil d’un chrétien occupe le premier rang ! L’enfant de Dieu a dix mille fois plus de motifs que tout autre de marcher en humilité devant Son Dieu, et de se montrer doux, indulgent et débonnaire envers ses semblables. Croyant, reçois donc instruction de mon texte, et n’oublie jamais que la vigne ne vaut pas plus que tous les autres arbres, si ce n’est à cause de la fertilité que Dieu lui a départie.

2. Mais si mon texte donne aux fidèles en particulier une leçon d’humilité, il donne aussi à tous ceux qui se réclament du nom de Christ un bien sérieux avertissement.

Examinez-vous vous-mêmes, semble-t-il nous dire ; car ainsi qu’une vigne stérile est dénuée de toute valeur, ainsi l’homme qui fait profession de piété sans porter les fruits convenables à la piété, est l’être le plus inutile et le plus méprisable qui soit ait monde.

Étudions ce grave sujet, mes chers amis. Et tandis que je parlerai, puissent mes paroles pénétrer dans chacune des âmes ici présentes, en Sorte que tous ensemble, ministres et laïques, anciens de l’Église et simples auditeurs, nous soyons portés à sonder nos cœurs et nos reins, afin de reconnaître si réellement nous sommes dans la foi ou bien si notre prétendue piété ne serait pas un vain et stérile formalisme.

En abordant notre sujet, quatre questions se présentent naturellement à l’esprit. En premier lieu : Où trouve-t-on la vigne stérile, c’est-à-dire le chrétien formaliste ? Ou, ce qui revient à peu près au même : Comment peut-on le reconnaître ? En second lieu : D’où vient qu’il soit stérile ? En troisième lieu : Quel est le cas que Dieu fait de lui ? Et en quatrième lieu : Quelle sera sa fin ? Reprenons successivement chacune de ces questions.

Et d’abord : Où trouve-t-on le chrétien formaliste ? Je réponds : Partout. Oui, mes chers amis, partout : en bas et en haut, dans les chaires et sur les bancs, dans l’Église et dans le monde. Il n’est pas d’assemblée de croyants où ne se glisse quelque faux frère. Ne nous préoccupons donc pas des autres communions religieuses, mais disons-nous qu’il y a des formalistes dans notre Église, qu’il y en a dans cette assemblée. À quelque portion de la vigne du Seigneur que vous apparteniez, soyez sûr qu’elle renferme dans son sein plus d’un sarment stérile ; et qui vous dit que vous n’en êtes pas un vous-même ? 

Le formaliste se rencontre dans toutes les positions, dans tous les rangs de la société.

Tantôt, il est riche ; il nage dans l’opulence ; Dieu lui a donné une grande part des biens de la terre, et peut-être l’Église à laquelle il se rattache, oubliant que Dieu a choisi les pauvres de ce monde, est fière de le compter parmi ses membres. Elle l’honore d’une façon particulière ; et pourtant, que reçoit-elle de lui, en retour des hommages qu’elle lui prodigue ? Rien, ou presque rien.

Ses pauvres sont encore dans le dénuement ; ses ressources ne sont pas augmentées par les trésors de l’homme riche ; ou si elle reçoit un peu de son or, du moins n’est-elle ni soutenue par ses prières ni honorée par la sainteté de sa vie, car il marche dans la voie des pécheurs et se plonge dans les voluptés, ne se servant de la religion que comme d’une sorte d’uniforme sous lequel il espère cacher sa conduite indigne. Mais s’il faut souvent aller chercher le formaliste parmi les riches, il se trouve souvent aussi parmi les pauvres.

Combien de personnes appartenant à la classe indigente qui se sont jointes à telle ou telle Église et qui ont reçu de la part des fidèles l’accueil le plus cordial ! 

On se félicitait de voir la pauvreté et la grâce se donner la main ; on se réjouissait à la pensée que la piété allait embellir la cabane du pauvre, et faire de son humble demeure une demeure de paix. Mais, hélas ! bientôt on a découvert que ce pauvre se dégradait lui-même en s’adonnant à des habitudes vicieuses, et déshonorait son Dieu en se conduisant d’une manière indigne de sa profession : il était buveur, jureur ou paresseux, en sorte que bien loin d’être un membre utile de l’Église, il était pour elle un fardeau et un opprobre.

Tantôt, l’on trouve des formalistes dans ces hommes de grand savoir et de haute intelligence, dans ces théologiens érudits qui mènent, pour ainsi dire, l’avant-garde de l’armée de Dieu ; dont la parole est éloquente et persuasive, dont l’opinion fait loi, qui parlent comme des prophètes et qu’on regarde presque comme inspirés. Ils ont sans nul doute porté des fruits de science, de popularité ou de philanthropie ; mais leurs cœurs n’étant pas droits devant Dieu, leurs œuvres, excellentes en elles-mêmes, n’ont rien de commun avec la sanctification ; c’est pourquoi la fin de ces hommes ne saurait être la vie éternelle (Romains 6 v. 22). 

C’est en vain qu’on chercherait en eux les fruits de l’Esprit ; car ils ne sont point des sarments vivants de ce cep divin duquel seul procède toute vie. Mais si d’une part il y a des formalistes parmi les sages et les intelligents, de l’autre il y en a parmi les petits et les illettrés. Gens modestes et sans prétentions qui parlent peu et dont personne ne parle, ils se glissent régulièrement chaque dimanche dans la maison de Dieu, s’assoient à leur place accoutumée, écoutent le sermon, puis s’en vont, persuadés que par le seul fait de leur présence au culte divin, ils ont rempli leurs devoirs religieux. En général, ils sont silencieux, réservés, et se plaisent dans l’isolement. Paresseux et égoïstes, ils se replient sur eux-mêmes et ne font rien pour autrui ; vigne stérile, ils occupent inutilement la terre.

Et de même qu’il y a des formalistes dans toutes les conditions sociales, de même il y en a dans toutes les conditions spirituelles. C’est ainsi, par exemple, qu’on peut en trouver parmi ces âmes qui sont toujours à craindre et à douter.

Comme le croyant faible et mal affermi, ils répètent souvent : Hélas ! Mon, cœur tremblant se demande sans cesse, suis-je au monde ou suis-je au Seigneur ?

Ils expriment constamment la crainte de ne pas aimer Jésus. Et en vérité, ce n’est pas sans raison qu’ils ont des craintes à cet égard ; car s’ils ne portent point de fruit, s’ils ne s’étudient point à affermir leur vocation et leur élection, ils témoignent hautement par-là que, malgré leur simulacre de religion, ils n’ont aucune part en Christ. Mais, d’un autre côté, il faut souvent aller chercher le formaliste parmi ceux qui ne doutent jamais.

Aussi haut que qui que ce soit, il dira, sans rougir et sans hésiter : « Je sais en qui j’ai cru ; je sais que je suis chrétien ; que d’autres aient des doutes, c’est possible ; quant à moi, je suis certain que mes péchés ne peuvent pas plus me condamner que ma justice ne saurait me sauver. Quoi qu’il en soit et quoi que je fasse, je suis au Seigneur… » Ah ! pauvre âme aveuglée, Dieu veuille dissiper ta funeste illusion et te faire reconnaître que, malgré ta confiance, tu ne vaux pas plus que celui qui doute toujours et ne croit jamais !

Il y a tel formaliste qui, invité à prier dans une réunion fraternelle, s’excuse toujours sous un prétexte ou sous un autre, qui néglige le culte de famille, et probablement aussi ses dévotions particulières. Mais par contre, il y a tel autre formaliste qui se lève avec empressement et qui prie pendant un quart d’heure avec une abondance remarquable. Il a beaucoup de paroles, mais point de fond ; beaucoup de feuilles, mais point de fruits ; il possède le don de bien parler, mais non celui de bien vivre ; il s’exprime bien, mais agit mal ; il est pieux dans son langage, mais non dans sa conduite ; il sait discourir des choses saintes, mais il ne sait pas marcher saintement avec son Dieu et le servir avec joie. 

Mes chers auditeurs, je ne connais pas chacun de vous ; j’ignore quels sont votre caractère, votre réputation, vos habitudes, votre moralité ; mais je sais une chose : c’est que quelque considérés que vous soyez dans le monde, quelque confiance que vous inspiriez à l’Église elle-même, vous n’êtes nullement en droit de conclure, sans vous être préalablement examinés avec soin, que votre piété est autre chose qu’un froid et vain formalisme. Sachez-le bien, il est très facile de se séduire soi-même.

Tous les, arbres stériles ne croissent pas dans le désert du monde ; il en est, hélas ! un trop grand nombre qui étendent leurs rameaux sans sève et sans vie au centre crème du jardin de Dieu.

Je le répète, les formalistes se trouvent partout : il y en a de tout genre et de tout caractère ; il y en a de tout rang et de toute condition ; il y en a parmi les grands comme parmi les petits ; parmi les savants comme parmi les ignorants ; parmi les riches comme parmi les pauvres ; parmi les membres les plus timides, les moins connus d’un troupeau, comme parmi ceux qui se mettent le plus en évidence. À chacun donc de s’examiner soi-même !

Mais dois-je essayer de vous décrire le formaliste avec plus de détails encore ? Voyez cet homme qui néglige la prière du cabinet et qui ne marche point devant Dieu en public ; cet homme qui rend à son Créateur un culte hypocrite, et qui, tout en affectant le plus grand respect pour ses devoirs religieux, use de déloyauté dans les affaires, et de fraude dans son commerce ; cet homme enfin, qui, semblable aux Pharisiens orgueilleux dont le Seigneur disait qu’ils dévoraient les maisons des veuves, cache habilement ses iniquités, puis va, le front haut, se présenter devant Dieu, en s’écriant : Ô Dieu ! je te rends grâces de ce que je ne suis pas comme le reste des hommes ! Voilà un formaliste, mes frères ! voilà un sarment stérile ! il fait profession de christianisme, c’est vrai, mais il ne porte aucun fruit qui vienne à maturité.

Voyez encore cet homme qui se fait gloire de sa moralité et de son excellence ; il se confie dans ses œuvres et se flatte d’être sauvé par ses mérites ; il s’approche de Dieu, et lui demande son pardon ; mais un mensonge est dans sa main droite, et ses lèvres sont des lèvres trompeuses, car il apporte avec lui sa propre justice et il ne croit point avoir besoin de la grâce qu’il sollicite. Lui aussi est un formaliste, lui aussi est un sarment stérile, car il n’a de la religion que les dehors et l’apparence.

Et qu’est-il de plus qu’un formaliste, cet homme si rigide, si inflexible sous le rapport de la doctrine, mais si relâché, si accommodant sous le rapport de la vie ? Il est très orthodoxe en théorie, mais il l’est fort peu en pratique. Il fait grand bruit de ses croyances, mais il les désavoue par sa conduite. Il est le premier à chanter :

C’est pour l’éternité que le Seigneur nous aime ; mais évidemment il n’a jamais eu de par l’amour de Christ, puisqu’au lieu d’aimer et servir son Maître, il continue à pécher afin que la grâce abonde.

Mais que fais-je ici en m’efforçant de vous démasquer, ô hypocrites ? Puisse le Seigneur lui-même vous démasquer en cet instant devant vos propres consciences. Ah ! que d’arbres stérile que de chrétiens purement extérieurs, que de membres indignes de l’Église n’y a-t-il pas dans cet auditoire ! Oh ! qu’elles sont nombreuses les âmes auxquelles pourrait justement s’adresser la malédiction prononcée contre Méroz : Maudissez Méroz, a dit l’ange de l’Éternel ; maudissez, maudissez ses habitants ; « car ils ne sont point venus au secours de l’Éternel, au secours de l’Éternel, avec les hommes puissants » (Juges 5 v. 23) !

Combien bien parmi vous, en effet, qui se contentent de manger le plus gras du pays, et de boire le vin doux (Néhémie 8 v. 10), sans porter aucun fruit à la gloire du Seigneur ? Paresseux Issacars, « vous vous tenez couchés, comme un âne gros et fort, entre des jougs » (Genèse 49 v. 14), sans rien faire pour votre Maître vous traversez la vie, sans parler de Christ, sans prier pour Christ, sans donner à Christ, sans vivre pour    Christ ! Vous avez la réputation d’être vivants, mais vous êtes morts ; vous vous drapez dans une profession extérieure de piété, mais vous ignorez absolument ce que c’est que de se consacrer à Dieu et de s’offrir tout entier à lui en sacrifice vivant et sain. Jugez vous-mêmes, mes frères, de ce que je dis ; si, en cet instant, vous étiez passés au crible, combien d’entre vous sortiraient purs de cette épreuve.

N’est-il pas vrai qu’il y a dans nos Églises un grand nombre de soi-disant chrétiens aux prétentions élevées, qui volent haut, mais ne font rien ; qui sont empressés à parler de l’Évangile, mais lents à vivre selon l’Évangile, qui se plaisent peut-être à entendre annoncer la vérité, mais qui ne pratiquent pas cette vérité, en servant leur Dieu et en honorant sa sainte cause ? À de tels chrétiens, je dis hautement : Vous êtes les êtres les plus inutiles, les plus destitués de valeur, qui existent dans le monde. Comme la vigne, vous seriez honorables si vous portiez du fruit ; mais de même qu’un cep improductif est méprisable, de même vous n’êtes bons à rien qu’à être jetés dehors et brûlés au feu.

Et maintenant je passe à la seconde question D’où vient que les âmes dont nous parlons soient stériles ?

La réponse est bien simple : parce que leur piété n’a point de racines, Oui, il n’est que trop vrai, beaucoup de membres de nos Églises n’ont pas la moindre racine en eux-mêmes. Il se peut qu’ils aient de beaux dehors, et que de loin leur aspect séduise ; mais encore une fois les racines leur manquent. Ne vous souvient-il pas de ce jeu de votre enfance, alors que vous cueilliez quelques fleurs et que vous enfonciez leurs tiges dans la terre ?

Vous appeliez ce parterre improvisé « votre jardin » ; puis le lendemain, vous couriez le visiter, mais toutes les fleurs étaient fanées et mortes. Ainsi en est-il de beaucoup de prétendus chrétiens : jolie fleur mise en terre sans racine, n’ayant aucune adhérence au sol, et par conséquent ne puisant en lui aucun suc nourricier, leur piété se flétrit et meurt sans avoir porté aucun fruit agréable à Dieu. Tu t’es trop hâté, ô mon frère. Tu as dit à ton pasteur : « Je désire être reçu dans l’Église ! »

Celui-ci t’interroge, s’assure que tu connais la vérité ; tu lui affirmes solennellement que ton cœur est en paix avec Dieu. Alors, il te baptise (on sait que le Rév. Spurgeon appartient à l’Église baptiste, et que dans cette Église nul ne peut recevoir les eaux du baptême ou participer à la cène sans avoir fait une profession de foi individuelle, Note du Traducteur), te reçoit au nombre des enfants de Dieu ; mais hélas ! ta vie religieuse n’avait point de racines ; aussi qu’est-il arrivé ? Après un temps, elle a séché. Les ardeurs du soleil l’ont brûlée, ou bien elle va s’étiolant de jour en jour, sans porter aucun fruit. Et comment aurait-il pu en être autrement puisqu’elle n’avait aucune racine ? C’est à la racine, mon frère, que tu aurais dû songer tout d’abord ; puis les branches auraient crû d’elles-mêmes ; mais c’est le contraire que tu as fait : de là provient ta stérilité.

Et ici j’éprouve le besoin de m’adresser tout particulièrement aux jeunes gens de mon troupeau. Le dirai-je ? Je tremble souvent en pensant à eux, car je crains que dans bien des cas ils ne prennent pour une véritable conversion ce qui n’est que le résultat de l’entraînement ou d’une excitation passagère. Ils ont peut-être éprouvé pendant un temps un certain travail dans leur conscience ; toutefois ce travail n’était pas assez profond, assez réel pour être divin ; aussi ne saurait-il durer. Mais alors même que toute trace de piété intérieure s’est évanouie, malheureusement la profession extérieure reste, et ils se font de cette profession même un oreiller de sécurité. 

« Nous sommes membres de l’Église, se disent-ils ; nous n’avons donc rien à craindre ! » Avertissez-les solennellement ; insistez sur le devoir de s’examiner soi-même : vos paroles ne les touchent point. Ils sont baptisés, admis à la cène ; ils ont en quelque sorte franchi le Rubicon qui sépare le monde de l’Église ; que leur faut-il de plus ? Oh ! je ne saurais dire combien je tremble pour ces jeunes âmes ! Sans doute, je gémis à cause de l’endurcissement des incrédules ; mais je gémis bien plus amèrement encore à cause du fatal aveuglement de ces pauvres cœurs abusés ; car comment espérer parvenir à faire impression sur eux, puisqu’ils se croient dans le meilleur état possible, tant qu’en réalité ils sont dans un fiel très amer dans les liens de l’iniquité ?

 

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